Que manger sous corticoïdes ? Equilibre alimentaire et hygiène de vie pour mieux vivre son traitement
Dans mon métier, il m'arrive d'accompagner des personnes en qui sont sous traitement médicamenteux. Nombreux parmi eux suivent un traitement plus ou moins long de corticothérapie, principalement pour des pathologies inflammatoires chroniques comme la polyarthrite rhumatoïde, des maladies respiratoires chroniques, des maladies auto-immunes ou des allergies importantes.
Lorsque l'on suit un traitement par corticothérapie, qu'il soit ponctuel ou chronique, il faut veiller à adapter ses apports alimentaires afin de limiter les carences induites par la prise de corticoïdes.
Voici ici quelques éléments pour équilibrer au mieux son alimentation et vivre cette période avec le moins de désagréments possibles. Car la Naturopathie est aussi complémentaire de la médecine allopathique, où dans des cas comme celui-là, elle peut grandement aider à limiter les effets secondaires des médicaments.
Un peu de sémantique...
Les corticoïdes sont des anti-inflammatoires stéroïdiens, c'est-à-dire qu'ils agissent sur le système endocrinien. Il va donc se produire des modifications dans l'équilibre hormonal de notre organisme. Les surrénales vont être prioritairement impactées par ces modifications car les corticoïdes vont mimer la sécrétion de Cortisol, et ainsi remplacer la fonction endocrine momentanément, en apportant des dosages en cortisone bien plus importants que notre glande hormonale n'aurait pu le faire de manière physiologique.
Or, l'équilibre de notre système endocrinien s'appuie sur un trépied en équilibre entre toutes les glandes hormonales, qu'il s'agisse de l'hypophyse, de la thyroïde, des surrénales, du pancréas, des glandes sexuelles etc.
De plus, la fabrication et le recyclage des hormones dépendent de nombreux facteurs parmi lesquels l'alimentation. Celle-ci doit apporter en quantité et en qualité suffisante les éléments indispensables à la fabrication et à l'utilisation de ces hormones par nos organes et notre organisme tout entier.
Ainsi, les protéines, les vitamines et les minéraux sont les éléments fondamentaux de cette chaîne vertueuse hormonale.
Mais concrètement, que ce passe-t-il lorsque nous prenons des corticoïdes ?
L'organisme voit affluer de grandes concentrations de cortisone, qui va alors remplacer le Cortisol naturellement produit par les surrénales.
Si le Cortisol est naturellement sécrété pour gérer un stress chronique ou pour nous permettre de nous réveiller le matin par exemple (le pic physiologique de Cortisol est à 8h du matin), il va induire une légère hyperglycémie et donc puiser dans les réserves protéiques du corps, ce qui va assurer la nutrition et la recharge des tissus en nutriments afin de permettre une résistance et une adaptation à cette demande.
Ceci est physiologique, mais lorsque on prend des corticoïdes, les dosages dépassent souvent pour un temps court ou long les valeurs « physiologiquement acceptables ». La glycémie augmente beaucoup, avec des effets délétères sur tous les tissus (lié à la glycation des protéines) ce qui permet de comprendre pourquoi il faut alors veiller à modifier ses apports alimentaires afin de répondre à ces modifications induites.
Les bonnes habitudes à mettre en pratique dans votre assiette
Pour limiter cette hyperglycémie et ses effets pervers sur notre organisme, il faudra donc veiller à réduire fortement les apports en sucres : sucres de rajout et raffinés, sodas, snacking, au profit du sucre naturellement présent dans les fruits et légumes, en restant bien entendu dans des limites de consommation raisonnables et adaptées (1 à 2 fruits/jour max) et toujours accompagnés d'un complément protéiné (graines oléagineuses du type amandes, noisettes etc.) pour retarder l'assimilation du glucose dans le sang et ainsi limiter le pic glycémique.
De même, les grandes concentrations de cortisone dans le sang vont modifier l'équilibre des réserves minérales de notre corps. Cela va notamment favoriser l'excrétion urinaire du Calcium et du Potassium, augmenter en conséquence la rétention d'eau par déséquilibre du couple Sodium-Potassium (le Sodium retient l'eau dans l'organisme, on pourra alors voir apparaître des gonflements et des œdèmes des membres inférieurs et du visage, une légère hypertension etc.).
Les concentrations en Calcium doivent elles aussi demeurer en équilibre dans le plasma sanguin, l'organisme va alors aller chercher ce Calcium manquant dans nos réserves fondamentales (os, dents, muscles et tendons). Les conséquences peuvent donc aller d'une plus grande fatigabilité musculaire, des courbatures et des crampes, à une perte osseuse conséquente et une fragilisation des dents. Les risques d'ostéoporose sont réels pour les personnes sous corticoïdes depuis de nombreuses années.
Il faut donc impérativement veiller à des apports suffisants en Calcium, en Potassium et limiter la consommation de Sodium (sel de table et sel caché dans les préparations industrielles salées ET sucrées).
De même, il faudra augmenter les apports en minéraux alcalins afin de compenser l'acidose tissulaire générée par les déficits en Calcium et en Magnésium (car ils fonctionnent ensemble).
Enfin, il faudra veiller à bien conserver voire augmenter les apports en protéines.
Concrètement, cela signifie :
- Augmenter ses apports en protéines de qualité, d'origine animale ET végétale, afin d'apporter des acides aminés essentiels et des minéraux variés (que l'on retrouve dans les légumineuses par exemple) pour contrer la perte musculaire.
- Augmenter les apports en produits frais, en légumes colorés et verts foncé, qui doivent être consommés en crudités ou légèrement décrudits (pour limiter les pertes minérales et vitaminiques lors de la cuisson), riches en minéraux et en vitamines naturelles (donc de préférence issus de productions locales et biologiques).
- Apporter chaque jour de grandes portions d'aliments riches en Calcium mais aussi riches en cofacteurs permettant une bonne assimilation de ce Calcium : vitamine D, vit K, Magnésium, Phosphore, vit B6-B9-B12 etc. Par exemple, en complément des apports en Calcium (graines oléagineuses, légumes à feuilles vertes, algues marines, produits laitiers etc.), consommer de la levure de bière en paillettes à saupoudrer sur vos salades.
- Limiter le Sodium dans son alimentation quotidienne : lire les étiquettes des produits avant d'acheter, sachant que les dosages maximum recommandés par l'OMS en Sodium dans l'alimentation sont de maximum 2gr/jour, pour une personne normale, c'est-à-dire sans médication ! Afin de le limiter, utiliser le Sodium naturellement présent dans les légumes : pour vos soupes, pensez au céleri ou au fenouil par exemple, pour les sauces, utilisez des algues en paillettes, utiliser un peu de vinaigre ou du jus de citron plutôt que de la moutarde pour vos sauces salades.
- Augmenter les aliments riches en Potassium, pour limiter la rétention d'eau : Bananes, figues, abricots secs, autres fruits secs et graines oléagineuses, légumes-racines.
- Limiter fortement la consommation de sucres sous toutes ses formes : consommer le sucre naturellement présent dans les fruits à raison de 1 à 2 fruits/jour max. (et accompagné d'un apport protéiné pour limiter le pic d'insuline comme expliqué plus haut).
- Augmenter la consommation de bons acides gras, surtout les acides gras polyinsaturés riches en acide alpha-linolénique du type Oméga 3, afin de lutter contre l'inflammation et protéger votre système cardiovasculaire : Huiles végétales de première pression à froid riches en Oméga 3 (lin, colza, chanvre, cameline, noix), petits poissons gras (sardines, maquereaux, harengs...), œufs fermiers bio nourris aux graines de lin etc.
Prendre soin de votre hygiène de vie sous corticothérapie
En complément de tous ces conseils alimentaires, il est conseillé de prendre soin de son hygiène de vie et de son équilibre psycho-émotionnel, car ils influencent grandement la réussite du traitement :
- Manger à heure régulière et dans le calme, bien mastiquer pour faciliter l'assimilation de tous ces nutriments si nécessaires !
- Se reposer suffisamment pour permettre à l'organisme de récupérer. Si besoin faire une petite sieste post-prandiale, et se coucher à heure régulière
- Avoir une activité physique douce et régulière pour équilibrer la glycémie et limiter la fonte musculaire
- Bien gérer ses émotions et son stress, avec si besoin un accompagnement par un thérapeute, naturopathe, sophrologue, conseiller en fleurs de Bach, ou psychologue. Car si les émotions sont grandement influencées par les hormones, l'inverse est également vrai !